Sans industrie, nos élèves d’aujourd’hui seront demain les meilleurs candidats au chômage

En terme de géopolitique, notre Sahel est caractérisé par des logiques de chaos qui se propagent par effet domino à tous les pays de la sous-région. Cette interconnexion de la crise est au cœur de la problématique sahélienne. 

Malgré le fait que nous avons été épargnés de cette crise grâce à une politique sécuritaire réussie, en terme économique sa conséquence première réside dans la difficulté d’attraction des investisseurs dans une zone identifiée comme ‘’zone rouge’’.

D’autres facteurs additionnels endogènes dont l’héritage du lourd tribut de ‘‘la décennie noire’’ dans laquelle le pouvoir avait été instrumentalisé à des fins d’enrichissement illicite ont constitué une vrai tare au développement du pays annihilant une croissance déjà morose et provoquant comme effets induits la montée de la pauvreté. 

Face à cette situation, le pouvoir en place a engagé de grands chantiers sociaux économiques importants dont certains commencent déjà à porter leurs fruits. Mais l’ampleur des défis est si importante qu’on risque de connaître une évolution  déséquilibrée pour certains domaines au détriment d’autres inhibant ainsi les efforts d’émulation et d’innovation tant attendu dans ces secteurs. Tout en restant vulnérable, nous bénéficions d’une stabilité politique appréciable soutenue par une forte cohésion sociale ancestrale. 

Au moment où notre survie continue à dépendre toujours du cours de nos matières premières sur le marché international, le monde autour de nous s’engage dans une quatrième révolution industrielle basée sur la convergence entre le monde virtuel et le monde réel. Une industrie marquée par les performances de l'intelligence artificielle, les technologies de pointe, les progrès de la robotisation, la science des données, l’automatisation avancée et les véhicules à guidage automatique.  

 

Nos richesses naturelles (l’or, le cuivre, le fer, le poisson..) sont extorquées à grande échelle depuis l’indépendance et il devient urgent de procéder à un certain rééquilibrage par l’émancipation de l’industrialisation jusqu’ici oubliée. La promotion de l’investissement dans le secteur manufacturier devra se faire en même temps que les projets d’infrastructures, d’électrification, d’eau, d’assainissement, de santé, d’agriculture, etc…

En Afrique certains pays  rêvent de réinventer le modèle chinois par les incitations fiscales et les bas salaires en attirant les usines américaines et européennes. L’une des caractéristiques les plus marquantes de l’ouverture économique de la Chine est l’afflux massif d’investissements directs étrangers. Des politiques préférentielles ont été octroyées aux joint-ventures entre les entreprises étrangères et locales avec exemptions de droits de douane, la réduction du taux d’imposition sur les revenus  etc…

L’industrialisation est un instrument de développement pouvant assurer une croissance rapide, une prospérité, une amélioration de la vie des populations, une grande possibilité d’emploi et une autosuffisance par substitution aux produits importés. L'afflux vers l’industrialisation des pays en développement est justifié en plus par la récupération de la plus-value et l’assurance de la qualité (en termes de composition, traçabilité, péremption etc…) des produits sur leur marché local face à une mondialisation non maîtrisée promue par les économies dominantes.

Certains des pays émergents les plus avancés sont déjà sur le point de devenir des numéros un mondiaux de la technologie dans un certain nombre de secteurs alors que nous continuons à traîner le pas. D’autres font désormais partie du groupe des pays développés tels que la Corée du Sud, Hong Kong, Singapour et Taïwan regroupés sous le nom générique des « quatre dragons asiatiques ». 

Notre amertume réside dans le fait qu’après six décennies, notre pays ne fabrique même pas une boite de sardine alors que nous produisons des centaines de milliers de tonnes de sardines par an et notre rattrapage dans le secteur industriel risque de prendre beaucoup de temps.‘‘Qui n’avance pas recule’’.

 

La raffinerie de pétrole de Nouadhibou, censée assurer notre sécurité en produits raffinés, créer des centaines d'emplois, contribuer au développement économique se trouve dans une situation d’oubli total. Elle aurait pu participer avec son unité de gaz à traiter le GPL du futur gisement de gaz de AHMEYIM pour produire du butane et du propane. En plus, avec l’addition d’une simple section de distillation sous-vide en traitant un brut réduit, elle aurait pu fournir du goudron nécessaire pour le développement de notre réseau routier (je reviendrai sur cette question dans l’un de mes prochains articles).

 

Dans le contexte de la stratégie de développement, l'État joue un rôle central dans la mise en œuvre d’une politique rigoureuse d’industrialisation par l’encouragement à la création des industries, aux investissements directs étrangers et à la promotion de l’esprit d’entreprises. L’objectif est de ‘‘produire ce que nous consommons’’. Sans industrie, nos élèves d’aujourd’hui seront demain les meilleurs candidats au chômage. 

A suivre…….  …

El Hadj OULD SIDI BRAHIM

Ingénieur de Pétrole.

اثنين, 12/07/2021 - 22:15